CONFIDENCES PRÉSIDENTIELLES - juillet 2004
JEAN-PIERRE CAILLOT
JPC et sa collection de camions : "J'ai deux passions : le transport et le foot"
"Je gère le Stade de Reims
comme une entreprise"
6 juillet 2004
Nouveau président du Stade de Reims, Jean-Pierre Caillot a accordé un long entretien à VDT. Ici, ni langue de bois, ni effet de manche : JPC n'évite pas les questions embarrassantes et répond sans détours.
LE BUDGET
Pouvez-vous
nous rappeler le budget de la saison à venir (2004-2005 - accession à
la L2) ?
Il est de 6,5 millions d'euros, soit presque le double
de l'an dernier.
Comment
s'explique cette différence ?
Il y a eu certains apports importants comme les droits TV. Environ 3 millions
pour un club de Ligue 2 cette saison.
Ce n'est pas neutre dans la constitution
d'un budget, ce qui fait que l'on est un peu obligé d'écouter ce
que nous imposent les télévisions, même si je comprends la
grogne des supporters que j'ai rencontrés la semaine dernière à
l'assemblée de la Ligue. Ce problème n'est pas simple, mais nous
y reviendrons.
Le deuxième apport est lié à l'augmentation
du budget des partenaires privés. L'an dernier nous avions réussi
l'exploit grâce à la dynamique régionale de réunir
environ un million d'euros. Cette année, l'objectif de 1,5 million est
en bonne voie malgré le fait que nous n'ayons pas grand chose de plus à
leur offrir (loges, etc.).
Par ailleurs des partenaires nationaux comme Orange
nous ont rejoint avec l'accession en L2. Enfin les collectivités locales
ont également suivi la dynamique en augmentant leur participation.
Quels
seront les sponsors maillots ?
Ils restent les mêmes que l'an dernier, sachant que tous ont conforté
leurs prestations. Nous avons cependant mesuré beaucoup de frémissements
avec la montée et, si le Stade de Reims s'installe durablement dans le
professionnalisme, beaucoup de choses très intéressantes sont à
venir.
Compte
tenu du recrutement de joueurs renommés, où en est le Stade du point
de vue de ce budget ?
Le budget est équilibré. Je
gère le stade de Reims comme une entreprise. Comme mon entreprise. Je ne
dépense pas ce que je n'ai pas. Même s'il m'arrive de prendre des
risques comme tout entrepreneur.
Par
exemple ?
Par
exemple, l'an dernier dans le recrutement. Si j'avais écouté les
gens qui me communiquaient les chiffres, je ne l'aurais peut-être pas effectué
de cette manière. Mais j'avais pressenti qu'avec les joueurs recrutés
nous aurions de bons résultats, donc des recettes. Et ce n'était
pas farfelu de le penser puisqu'à la fin le budget était équilibré.
Il faut savoir que nous n'aurons jamais de problème lors de nos passages
avec la DNCG à partir du moment où ne comptabilisons pas les éventuelles
rentrées des tours de Coupes. Ce ne sera que du bonus. Et un éventuel
joker
LE
RECRUTEMENT
Pouvez
vous nous expliquer la façon dont il s'est déroulé ?
Je fais beaucoup de parallèle entre l'entreprise et le club. Quand on est
dans une entreprise et que l'on prévoit des objectifs, on envisage son
recrutement. En sport c'est évidemment la même chose et là
nous avons fait un plan de recrutement.
Le premier à l'avoir défini
c'est Ladislas Lozano.
Nous avons déterminé ensemble où
nous avions besoin d'étoffer quantitativement l'équipe car, pour
des raisons de budget, nous avions un groupe réduit l'an dernier. Il nous
fallait également tenir compte de certaines faiblesses.
Cet aspect
des choses était traité dès février.
"J'ai une confiance absolue
en Fabrice Harvey"
En
Mars, même si on le disait du bout des lèvres, nous savions que David
François allait intégrer l'équipe. Avec Fabrice Harvey, qui
a une connaissance du milieu extraordinaire et pour qui j'ai une confiance absolue,
nous avons commencé à travailler sur des profils de joueurs par
rapport aux postes.
Par exemple, Ladislas Lozano voulait un demi gauche qui
soit gaucher, ce qui est rare en L2, donc il fallait recouper les informations
: "Est-ce que celui-là est mieux qu'un autre, etc.". Il fallait
ensuite s'informer de leur mentalité, ce qui pour nous est désormais
primordial. Ces nouveaux joueurs nous ont donc rejoints grâce à leur
qualités techniques et leur état d'esprit.
Il fallait en même
temps garder les joueurs que nous souhaitions. Tout s'est fait rapidement et sans
conflit. Nous avons renégocié certains contrats. Prenons exemple
de celui d'Amara Diané. Nous avons prévu deux nouvelles années
et sommes heureux de l'avoir fait.
L'étape suivante
était de faire venir des joueurs. Nous avons par exemple été
en contact avec Gravelaine mais n'avons pas réussi à aboutir. De
même pour Fayolle. Mais, globalement, nous avons réussi presque tout
ce que nous souhaitions.
Enfin, et ceci est très important, beaucoup
de nos joueurs sont polyvalents et nous avons doublé tous les postes.
LES OBJECTIFS SPORTIFS
Quels
sont-ils en terme de classement ?
Avec la
qualité du groupe, on peut ambitionner une place dans les 10 premiers.
Le travail réalisé fait que la probabilité de réussir
est importante. D'ailleurs les joueurs se sont mis en tête de réaliser
quelque chose de grand, notamment ceux qui étaient là l'an dernier.
Tout est possible. C'est la magie du football. Personne ne voyait les Grecs gagner
l'Euro
La
L1, c'est pour quand ?
3-4 ans serait l'idéal.
Quand nous aurons un stade de 22 000 places, il y aura possibilité économiquement.
Même si j'en rêve souvent je pense qu'il ne serait pas bien de monter
trop vite. Enfin si on monte, je prends ! Même si cela poserait des problèmes
d'infrastructures. De toute façon on se prépare malgré tout
à y accéder assez rapidement.
"Nous sommes à la fin d'un cycle basé sur le bénévolat"
Quelles
sont les actions à mener pour y parvenir ?
Il faut continuer à travailler sur la partie invisible de l'iceberg. C'est
à dire professionnaliser le club à tous les niveaux. Nous sommes
à la fin d'un cycle basé sur le bénévolat. Beaucoup
de gens, et je les en remercie, se sont investis. C'est grâce à eux
si on est là aujourd'hui.
Nous avons monté un comité
de direction qui se réunit tous les lundis et qui évoque sans cesse
ce qu'il faut améliorer.
Prenons l'exemple du staff médical.
Ils ont fait un travail fantastique mais nous avons décidé d'embaucher
un kiné à temps plein pour s'adapter aux besoins du professionnalisme.
Le
centre formation, sera-t-il bientôt opérationnel ?
Dès la fin de la saison prochaine, nous préparerons le dossier "centre
de formation" et espérons avoir une dérogation, comme Grenoble
il y a quelque temps, afin de l'avoir en deux ans.
Désormais, l'argent
investi dans ce secteur doit nous former de bons joueurs. Et nous avons de bons
espoirs. Par le passé nous nous sommes fait piller nos meilleurs jeunes.
Mais cette époque se termine. Cette année les benjamins ont participé
à la finale du championnat de France de Saint-Malo. Les 13 ans, et plus
généralement nos équipes de jeunes, se sont très bien
comportés au niveau national. Nous sommes sur la bonne voie. Nous devons
désormais faire venir les bons jeunes de la région.
Qui
décide de faire monter les jeunes dans le groupe pro ?
Ladislas.
LE STAFF
Le staff a-t-il été remanié ?
Non. Il a été renforcé. Ceux qui étaient en place l'an dernier sont toujours là et renforcent leurs actions. Nous avons donc embauché un kiné, et Frank Triquenaux est en observation de ce groupe. Il passera une matinée par semaine avec le groupe pro car Ladislas souhaite que ce qui est enseigné avec la Première au niveau du plan de jeu soit utilisé pour la réserve.
Justement, elle est désormais en DH
Nous ferons comme l'an dernier avec la Première et n'y passerons qu'un
an, même si le groupe s'avère presque plus difficile que celui de
CFA2.
La nouvelle vie de David François
"Je veux intégrer
les anciens dans le staff"
Peut-on parler de Serguei Iakovlev ?
Lire
Bien sûr ! C'est un ami. Il entraînait mon fils. J'ai de bonnes relations
avec lui et j'aurais même vu d'un très bon il qu'il vienne
renforcer une équipe de foot d'entreprise (sourire).
A partir du moment où nous supprimions une équipe, il fallait lui trouver un poste. Il n'avait pas les diplômes, ce qu'on a tendance à oublier. Je suis intervenu pour qu'on lui donne un poste avec la rémunération qu'il avait. Aujourd'hui il a choisi Epernay parce qu'il avait un intérêt financier à y aller. Ce qui se respecte.
Qui
a choisi Franck Triquenaux pour entraîner la B ?
Ladislas.
Nous avions réfléchi à faire venir quelqu'un de l'extérieur
mais le coach a proposé que, pour un an, Franck s'occupe de la réserve.
Il reviendra ensuite à la formation car c'est sa vocation. Il sait que,
même si l'équipe monte en CFA2, il est probable qu'il y soit de retour.
Quels sont les rôles de Fabrice Harvey et de David
François ?
Quand je suis arrivé, Fabrice avait officiellement
une fonction commerciale. Je me suis rendu compte, en le regardant travailler
tous les jours, qu'il était tellement utile et impliqué -notamment
dans le domaine sportif - que j'ai trouvé légitime par rapport aux
contacts qu'il avait de le nommer Directeur sportif.
Comment se passe alors l'aspect commercial ?
Il garde sa fonction. Mais, si je suis le président du Stade, j'en suis
aussi son premier commercial. Il n'y a qu'un intérêt : ramener de
l'argent dans les caisses du club. Peu importe qui le fait.
Et David François ?
Cela fait
partie de ce que je souhaite au niveau du Stade de Reims dans les années
à venir, c'est-à-dire intégrer des gens qui ont montré
leur valeur au club. Par exemple Olivier Tingry a deux ans de contrat. Ensuite
il renforcera la cellule des gardiens. L'avenir passe par l'intégration
de joueurs qui connaissent le style de jeu et les valeurs du club.
David s'investit
terriblement dans ce qu'il fait. Il fait un travail énorme.
VOTRE PRÉSIDENCE
Comment
la vivez vous ?
C'était clairement un but dans la vie.
J'ai deux grandes passions, le transport et le foot. Je voulais m'occuper d'un
club et je ne me voyais pas m'investir ailleurs qu'à Reims. Je l'ai dit
aux joueurs, j'ai eu ma première licence de foot au Stade à 12 ans.
Le stade c'est un mythe, un rêve. Je suis, comme vous, un grand supporter
!
Aujourd'hui je suis heureux. Stressé, mais d'abord heureux. Et le
rêve continue.
"Au retour de Dijon
j'ai eu un malaise"
Les
meilleurs moments et
les pires ?
Le 1er match contre Pau.
Après le 1er but de Moukila, je me suis mis à pleurer comme un gamin.
J'avais tellement travaillé
C'était un moment très
fort ! Dans les grands moments, le parcours en Coupe de France. Et bien sûr
dans les pires, l'élimination à Dijon où j'ai même
fait un malaise au retour
On ne peut pas dire pour une première
saison que l'on ait vécu de mauvais moments. Il y a eu des périodes
de doutes, quatre matchs en prenant un point
Comment
cela s'est-il passé en interne ?
On a resserré les
choses. Le staff et les joueurs ont parlé ensemble. Je suis intervenu pour
leur expliquer que cela faisait partie d'une saison et de la vie d'un groupe,
qu'il fallait qu'ils se reprennent mais qu'ils avaient toute notre confiance.
Résultat, on a perdu à Tours
Je suis intervenu à nouveau.
Nous avons eu une discussion avant Dijon, où nous nous sommes mis une grosse
pression en décrétant la mobilisation générale. Et
les joueurs ont eu l'attitude que nous attendions !
Dans les bons moments,
il y a bien sûr la montée à Beauvais ! Ah... et la troisième
mi-temps de Pau
(rires)
Vos
relations avec la mairie ?
Elles sont bonnes. Ils ont, depuis
un an, toujours répondu à nos demandes et, quelque part, c'est peut-être
aussi le fait de Ladislas. Il connaît très bien le travail municipal
Non vraiment, tout se passe bien.
Vos relations avec votre entraineur ?
Ce sont les mêmes que celles que j'ai avec mes cadres dans mon entreprise.
Je suis un affectif. J'aime les gens qui ont des valeurs. Je suis proche de mon
personnel et donc avec Ladislas comme avec Fabrice, nous nous respectons. Nos
relations sont excellentes.
C'est aussi une des clefs de notre réussite.
Quand pourrez vous vous dire : j'ai réussi ce
que je voulais faire au Stade de Reims ?
Jamais. Jamais !
Même si vous accédez à la L1 ?
Si j'arrive en L1, je viserai la Ligue des Champions.
Le jour où j'aurai
le sentiment que je n'apporte plus rien, là je partirai. Aujourd'hui je
pense avoir la capacité de mettre beaucoup de choses en place. Mais il
faut être intelligent et savoir se retirer à temps, surtout dans
un club comme le Stade de Reims qui est une histoire sans fin. Si demain quelqu'un
arrive avec beaucoup d'argent et qu'il est capable de tout révolutionner,
je me retirerai.
Je me suis préparé aux défaites. Je
sais que demain nous pouvons perdre les trois premières journées
de championnat mais cela fait partie de ma tâche. Si un jour quelqu'un peut
nous faire gagner quatre ans, je lui cède la place. Mais on est pas encore
là !
Pourquoi
avez vous voté pour que les matches aient lieu le vendredi ?
Déjà, il faut savoir que je m'amuse à voir certains présidents
dire qu'ils sont contre (NDLR : Pascal Urano - Sedan)
alors que les 17 présents ont tous votés pour. Personnellement je
me dis que c'était mieux le vendredi que le dimanche. Car c'était
ou l'un ou l'autre. Il a même été question que ce soit le
lundi !
JEAN-PIERRE CAILLOT |
Juin
2003 - Chef d'entreprise champenois (*) de 41 ans, marié et père de trois enfants, Jean-Pierre Caillot n'est
pas un nouveau venu dans l'environnement stadiste. Partenaire financier du club
depuis dix ans (sponsor maillot après que son nom soit d'abord apparu sur
le short) il était vice-président depuis 2001 et était candidat
à la présidence. Avec l'ambition de contribuer à la remontée
du Stade « et pas pour un aller-retour. Avec un stade Delaune en reconstruction,
nous disposerons d'un outil de travail à la hauteur de nos ambitions. Nous
allons aussi bâtir une équipe qui séduise le public. Les supporters
seront avec nous. Les Rémois aiment le football ».
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Vu des Tribunes : l'actualité du Stade de Reims - Rédaction-conception : Michel HAMEL |