Lozano contre-attaque
Dans
une longue interview accordée à Europe 1 après le 0-5 encaissé
contre Dijon et le 2-0 ramené de troyes, Ladislas Lozano vide son sac,
règle ses comptes, en mouille quelques-uns au passage et s'efforce aussi,
avec habileté, de diviser les supporters qu'il classe en "vrais"
et "faux". A vous de juger en démêlant, justement, le vrai
du faux.
Voici l'intégrale de Lozano... en attendant la suite. A Reims,
le printemps ne marque pas forcément la fin de l'Ibère.
"Le
président Caillot me soutient à fond"
Ladislas
Lozano, Reims est 15e et apparemment vous vivez des jours difficiles. Vous avez
des rapports assez conflictuels avec les supporters
C'est pas avec les supporters. Par bonheur, il y a de nombreux supporters, de
nombreux vrais supporters à Reims, depuis de nombreuses années.
Et on n'a pas attendu la saison 2004-2005 pour que ce club ait une histoire et
une grande histoire.
Il y a par contre des gens qui viennent au stade, et
qui pensent que le stade est un exutoire à vociférations de toute
sorte, pour déverser verbalement (et le verbal, vous le savez comme moi
précède souvent le gestuel). Pour y déverser tout un tas
d'appréciations, d'insultes répétées de façon
préméditée.
Quand c'est systématisé, ça
devient pénalisant parce que ça perturbe, ça perturbe tout
le monde, ça me perturbe moi.
Apparemment, c'est hyper personnalisé
sur moi-même, comme si je synthétisais tous les maux du Stade de
Reims. J'ai ma responsabilité. J'ai toujours fait face à mes responsabilités
mais, à un moment donné, trop c'est trop. Et là je m'en suis
ouvert auprès du président, Monsieur Caillot, qui me fait l'amitié
de me soutenir complètement et à fond, et qui n'est pas d'accord
non plus avec cette partie de public qui, vraiment, dessert l'équipe.
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Lozano
contre les Ultrem
On
vous sent un peu blessé...
Très blessé. On
a chacun son caractère. Les gens savent que je suis entier. J'ai eu, en
certaines circonstances des paroles directes, trop directes pour certains, mais
j'ai toujours eu l'intention et toujours fait attention à ce que je disais
au niveau de la dignité des paroles, de façon à rester cohérent,
à rester dans un cadre éducatif.
(1)
Et là, en fait,
ce que l'on vit, c'est tout à fait déplacé. Lorsque vous
avez des gens qui, au coup de sifflet... Comme ça s'est passé lundi
à Troyes, Un match très important pour le Stade de Reims
Lorsque
Monsieur l'arbitre déclenche le premier coup de sifflet qui fait démarrer
le match et, tout de suite, immédiatement, sans qu'on ait encore fait aucune
action ou quoi que ce soit, avec haut-parleur à l'appui on insiste sur
des appréciations très dévalorisantes à mon encontre,
de façon personnelle. Là, ça devient complètement
déplacé car ça devient personnalisé et je ne peux
pas l'accepter.
Il
y a des discussions qui ont été établies avec les supporters.
Vous n'y êtes pas
Les
discussions c'est, il me semble, du ressort et de la responsabilité des
gens du club, des responsables du club. On a demandé que je fasse des excuses
publiques à ce groupe de supporters parce que j'avais eu une opinion très
tranchée par rapport à leur attitude.
C'est moi qui suis blessé,
c'est moi qui se fait agresser, c'est moi qui se fait insulter et c'est moi qui
faut que je présente des excuses. Attendez
Il y a quand même
des choses qu'il faut savoir ne pas faire
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Qui
vous a demandé de vous excuser ?
C'est
un groupe de supporters qu'on appelle les Ultrem. Comme ils portent bien leur
nom, je n'ai pas de retenue pour dire qu'ils se placent surtout, de façon
exagérée, sur des extrêmes au niveau des appréciations.
Et
en ce qui me concerne, j'ai toujours eu une vie guidée par, entre autre,
la tolérance. Et la tolérance dans cette affaire, il n'y en a pas.
C'est plutôt de l'intolérance. Et l'intolérance ne grandit
pas les gens qui l'utilisent.

"Lozano
a calé", recalé à l'Ecole du rire
Oui,
parce qu'une banderole, par exemple, où il était marqué "Retourne
à Calais" ou quelque chose comme ça
Est-ce
que c'est acceptable qu'on puisse noter que "Lozano a calé".
Qu'est-ce que vient faire Calais dans l'histoire ! Calais
Ce qu'on a vécu
avec Calais, c'est quelque chose...
Et je n'ai aucune prétention quand
je le dis. Je pense aux joueurs de l'époque, je pense au club qui a beaucoup
travaillé pour ça. C'est l'une des plus belles pages de la Coupe
de France, du football français qui a été vécue, et
tournée, et écrite avec cette équipe de Calais. Et aujourd'hui,
on vient nous la renvoyer à la face, comme de vieux démons. De jalousie
!
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Non
mais, attendez
Lorsqu'on va jouer en octobre dernier à Montpellier
en Coupe de la Ligue. Et aller se faire éliminer 3-1 à Montpellier
est-ce que c'est un déshonneur ?
Et que deux spectateurs
On n'a
pas dit 20, ni 50, ni 2.000 ! Que deux spectateurs font le déplacement
et que la première chose qu'ils font c'est de dérouler une pancarte
que toute la France a vue sur les antennes, parce qu'elle est passée sur
les antennes de télévision françaises : "Lozano dehors
!".
Et ce sont des gens du club. Se faire insulter dans son propre
stade. Ecoutez, c'est quand même lamentable comme ça se fait actuellement
au niveau du stade de Delaune... Mais faire 2.000 kilomètres aller-retour
pour aller dérouler cette pancarte avant le match, est-ce que c'est acceptable
?
Vous
pourriez quitter le banc pendant un match s'il y a encore des banderoles ?
Je
pourrai le faire, mais je ne le ferai pas car mon professionnalisme me l'interdit.
Mais c'est quelque chose qui pourrait être fait de façon symbolique.
De façon symbolique, je serais capable de quitter le banc et de revenir
dans la minute qui suit. Mais de façon symbolique. Je serais capable de
le faire.
Est-ce
que vous craignez pour votre sécurité ?
Je ne veux
pas trop m'étendre là-dessus. Les personnes proches de moi qui m'aident
et qui m'entourent ont les documents. J'ai reçu des menaces. J'ai reçu
des lettres qui atteignent ma dignité, à moi personnellement, mais
au niveau de ma famille également. Et donc ça c'est inacceptable.
C'est inacceptable !
"Je
n'ai pris aucune décision mais je sais ce que je vais faire "

Et
dans ces conditions, vous envisagez de rester au Stade de Reims ?
Je
n'ai pris aucune décision pour l'instant. Je sais ce que je vais faire,
mais par respect j'en parlerai préalablement avec le président Caillot.
Une
décision très proche, très très prochainement, sera
prise. Si je dois rester, je resterai dans ce club qui a un grand projet qui est
en cours. Si je dois partir, ce sera vraiment avec un grand déchirement.
On
marche quand même sur la tête. Quand on entend ce que vous dites.
Quand on se dit qu'en France, il y a des entraîneurs qui sont menacés
de mort, alors que ce n'est que du football, du sport, ça devient n'importe
quoi. Il va vraiment falloir faire quelque chose. Je ne sais pas quoi, mais
Pour
prendre de la hauteur et dépasser mon cas personnel, on observe un déplacement
des prises de responsabilité réelles, en fait. On s'aperçoit
aujourd'hui que les groupes de supporters ne veulent pas seulement supporter,
mais veulent aussi participer à la décision par des moyens de pression
divers. Participer au recrutement, etc. etc.
Ca, c'est inacceptable. Les dirigeants
sont là pour diriger, les entraîneurs pour entraîner, les joueurs
pour jouer et les supporters pour supporter.
"
On joue le jeu des bêtes féroces "
Est-ce
qu'il ne faudrait pas prendre exemple sur ce qu'on voit en Angleterre, où
les supporters sont au bord du terrain
En tout cas, quand
on voit le grand le respect, le grand respect et cette grande dignité,
- je pense que c'est le mot qui convient bien - et cette grande confiance mutuelle
qui existe, ce grand respect qui existe entre tous les acteurs des matches professionnels
en Angleterre, en France, où il n'y a pas de grillages, où les joueurs
peuvent aller serrer la main du premier rang des spectateurs, il y a je pense
beaucoup à apprendre et surtout à prendre, à prendre en exemple
par rapport à tout ça.
Actuellement on s'aperçoit qu'on
cloisonne les gens. On les empêche quelque part
On joue leur jeu en
fait.. Une bête féroce, si vous l'enfermez de façon systématique
dans une cage, elle va tourner en rond et elle va devenir encore plus agressive
que si vous la libérez dans un grand espace.
Je
pense que là, il faudra revoir un peu la conception des stades. Il y a
un grand stade qui se construit actuellement au stade Delaune. J'ose espérer
que les gens qui ont pensé la conception y ont pensé.
Le
prochain match de Reims, ce sera contre Angers le 1er avril. Reims est 15e, Angers
16e. ca va être un match terrible
Vous redoutez cette date ?
Non,
non. J'ai toujours aimé les grands matches, les matches d'hommes. Je les
appelle les matches d'hommes parce que ce sont des matches de compétition
de haut niveau où il faut être à son meilleur niveau, où
la concentration est à son paroxysme, où on est impatient d'y être.
Et bien je suis impatient d'y être à ce match contre Angers, malgré
son importance.
Permettez moi de faire l'appel. Je voudrais
de ce match fasse l'objet de l'union sacrée avec tous ces gens, et toutes
les personnes, toutes les composantes du club, les supporters, les Ultrem inclus,
qui aident et qui aiment les couleurs rouges et blanches, et qui aiment le Stade
de Reims.
Ce
qui serait bien c'est que les vrais supporters de Reims, qui sont les plus nombreux,
se manifestent, fassent un geste et fassent l'union sacrée.
Je
sais que le président les a vus. Je sais qu'ils sont en train de réfléchir
à ce qu'ils vont faire ou pas faire, ou accepter de faire. En tout cas,
il faut espérer que tout ça se calme et que tout le monde revienne
un pas en arrière, de façon à ce qu'on reprenne de la sérénité.
Reims
c'est tout de même un club difficile. C'est un club aussi où il y
a des connaisseurs
Ce doit être difficile à gérer quand
on est entraîneur de Reims ?
C'est pas grave ça. Au
contraire, c'est très prenant, c'est très intéressant de
discuter avec un Georges Lech, avec un Michel Hidalgo, etc. C'est très
très intéressant. Ce sont des gens qui me font l'amitié de
m'appeler de temps en temps. Avec lesquels j'échange.
Et cette histoire
du Stade de Reims qui est grandissime, elle fait partie de nous-mêmes. C'est
un grand exemple pour nous.
Et on a aucunement l'intention d'imiter, et même
de penser pouvoir être capables d'être au niveau de ces gens. Des
gens comme Kopa etc. qui ont fait la grandeur du Stade de Reims.
Mais, tout
simplement, on veut vivre notre nouvel essor, notre nouvelle dynamique. C'est
un club qui renaît, c'est un club qui se reconstruit. Et un club qui se
reconstruit a besoin de temps. A besoin de patience. Et c'est en passant des obstacles,
avec des moments de difficultés, et être capable de passer ces moments
de difficulté, qu'on arrivera à être plus forts.
Les gens
sont impatients, intolérants et n'acceptent pas ça. Ca c'est difficile."
(1)
Dans un souci d'objectivité, il est utile de préciser
qu'à Troyes, Ladislas Lozano a répondu aux invectives des supporters
par un "doigt d'honneur".
Son
portrait
Merci
à "JLS", le forumiste qui a réalisé une capture
Mp3 du fichier de l'interview. Sans lui, il n'aurait pas été possible
de la restranscrire par écrit.